L’EXTASE
La nuit était venue, la lune émergeait de l’horizon, étalant
sur le pavé bleu du ciel sa robe couleur soufre. J’étais
assis près de ma bien-aimée, oh ! bien près ! Je serrais ses
mains, j’aspirais la tiède senteur de son cou, le souffle
enivrant de sa bouche, je me serrais contre son épaule,
j’avais envie de pleurer ; l’extase me tenait palpitant,
éperdu, mon âme volait à tire d’aile sur la mer de l’infini.
Tout à coup elle se leva, dégagea sa main, disparut dans la
charmoie, et j’entendis comme un crépitement de pluie dans
la feuillée.
Le rêve délicieux s’évanouit… ; je retombais sur la terre,
sur l’ignoble terre. O mon Dieu ! c’était donc vrai, elle,
la divine aimée, elle était, comme les autres, l’esclave de
vulgaires besoins !
§
Era scesa la notte, la luna emergeva dall’orizzonte, diffondendo
sull’azzurro selciato del cielo il suo vestito color dello zolfo.
Ero seduto accanto alla mia amata, oh! così vicino! Mi strinse la
le mani, aspiravo il tiepido profumo del suo collo, il soffio
inebriante della sua bocca, mi stringevo contro la sua spalla,
Avevo voglia di piangere; l’estasi mi teneva palpitante,
sperduto, la mia anima volava sul mare dell’infinito.
Improvvisamente si alzò, ritirò la mano, scomparve nel
bosco, e sentii come un crepitio di pioggia sulle foglie.
Il delizioso sogno svanì.. ; Ricaddi sulla terra,
sulla terra vile. O mio Dio! era dunque vero, lei,
l’amata divina, era, come gli altri, schiava
dei bisogni volgari!
JORIS KARL HUYSMANS